Arrêtée

La douleur est montée petit à petit, insidieusement, mais avec la régularité d’un métronome, ces dernières semaines.

Une contracture douloureuse en haut du dos, due à une légère courbure naturelle, accentuée encore par la grossesse.

Ces derniers temps, je finissais la journée grimaçante sur mon clavier, mais je me forçais à tenir.

Après plusieurs jours à me rendre quotidiennement à l’infirmerie de la boîte, j’ai tiré la sonnette d’alarme.

Infirmerie, médecine du travail, DRH compréhensive, patron aussi, sage-femme bienveillante et enfin médecin traitant pour un arrêt de 15 jours. Qui se renouvellera sans doute jusqu'au congé maternité. 

Ce soir, je suis rentrée chez moi vidée, comme tous les soirs depuis ces quelques semaines.

N’arrive pas vraiment à réaliser.

Mon bureau est vide, j’ai donné mes clés et ma plante verte à une collègue. Ma remplaçante pour les 8 mois de mon absence a été briefée et rebrieffée, connaît mon numéro de portable en cas de problème.

Ce soir, je tournais autour de ma chaise de bureau : le dossier Machin est au propre, la grille du prochain numéro bien en vue. Je lui laisse des chemises à élastiques, des cahiers neufs pour ses interviews. -Quelle chance elle a !-

Le message d’absence sur Outlook pour les centaines d'attachées de presse qui nous harcèlent est rédigé.

Il n’y a plus rien à faire... mais je ne peux pas partir.

Mes collègues pouffent, me poussent : « Allez va-t-en, fais nous un beau bébé »

Mais je n’arrive pas.

Je traîne de box en box, papotte avec chacun. Si je pouvais, je taperais même la discut’ avec le monsieur de l’accueil, tellement je ne veux pas partir.

Peur qu’on m’oublie, qu’une autre soit plus compétente, plus rapide, mieux organisée.

Que je ne retrouve plus mes marques, quand je reviendrais, après le grand bouleversement de la naissance.

Dieu qu’est ce que j’aime ce job quand même ! Depuis deux ans que je le fais, je n'arrive pas à lui trouver un défaut qui m'encouragerait à m'arrêter, même cette douleur intense qui indique que mon corps n'en peux plus.

Ce soir, je suis chez moi, mais je ne réalise pas vraiment.

L’appartement est sale et en bazar.

Tout cela attendra les jours meilleurs, quand je n’aurais plus cette douleur infernale dans mon dos qui supplie.

Ce soir, je vais prendre un long bain, attendre le retour de l’Aimé, manger avec lui une terrine fraîche de courgettes et quelques tomates bio, du panier d’un copain.

Ce soir, je ne vais penser à rien, qu’à moi, qu’à nous, à cette Bébé-fille qui ne sera plus trimballée de marche en métro pour les jours à venir.

Je ne réalise pas encore.

Mais bientôt peut-être… Peut-être.

Alors profiter enfin. 

Commentaires

1. Le vendredi, 6 août 2010, 22:06 par Akynou

Ha mais le vide sera bientôt bien rempli. Profite et tu retrouveras très vite ce métier que tu aimes

2. Le samedi, 7 août 2010, 11:31 par clem

Ah enfin de tes nouvelles après un mail resté lettre morte!
ne t'inquiète pas, c'est toi qu'on attend à ce bureau dans 8 mois. Personne ne te remplacera plus longtemps que prévu.
Et profite bien de ce REPOS, je dis bien REPOS, ça veut dire que c est fait pour se REPOSER parce qu'après l'accouchement le mot REPOS disparaît pendant quelques années de ton vocabulaire quotidien... je te préviens Marloute, fais ce qu'on te dit : REPOSE TOI.

3. Le lundi, 9 août 2010, 01:35 par Melle Bulle

Je découvre ton blog, je reviendrai te suivre ...
Bon repos mérité, couve bien cette petite fille qui comblera très vite ton "ennui" de ne pas travailler ;-)

4. Le lundi, 9 août 2010, 10:29 par Marloute

@ Akynou : Oui! J'espère que tout se passera bien et que mon retour ne sera pas trop cahotique!

@Clem : je vais essayer de me reposer comme tu dis!

@Mlle Bulle : Bienvenue ici!