La mégère

Depuis le départ de mes parents, une digue a lâché.

Je me retenais de taper, puisque je savais tout le côté délétère pour l’enfant, pour sa confiance, sa construction, son estime de soi. Mais le regard horrifié de mes parents sur le comportement de ma fille ainée et mes propres constatations : comment est ce possible d’être aussi insolente et désobéissante, comme est ce possible de demander 3 fois, 10 fois 15 fois à un enfant de 6 ans et demi de se laver les mains, de passer à table, de se laver les dents, de se mettre en pyjama et de n’avoir pour toute réponse qu’un « NON » sonore, avoir une enfant qui s’enfuit, se couche ou s’accroche aux meubles quand on veut la forcer ? Alors, je crie, je tape, je poursuis, je menace, je jette dehors, je ramène dans la maison de force. Le résultat : ma petite fille est triste, mais n’obéit pas plus.

Moi je me sens minable. Partagée entre l’envie d’en finir (partir, les planter là et prendre le premier train seule) l’envie de mourir (comme ça, le monde entier saura à quel point ce que je suis en train de traverser me dépasse littéralement) et l’envie de demander de l’aide.

Samedi, seule pour le week-end dans un état lamentable, j’avais décidé de ne faire que des choses agréables : pas de sortie ou très peu, à peine une promenade dans le quartier, dessins animés à gogo, et sieste pour moi. Malgré tout, le soir, à 20h30, quand la petite A. a renversé la cafetière de café froid qui s’est déversé sur le sol, pendant que les deux plus grandes avaient quitté la table malgré mes appels à rester assises, je me suis mise à pleurer. Je pleurais à gros sanglots, en criant « Aidez moi, aidez moi… j’ai besoin d’aide ». J’ai pris mes clés d’appartement, je suis sortie avec A. mon gros bébé de 14 mois dans les bras, pleine de café, et j’ai tapé à la porte de la voisine du rez-de-chaussée. Qui n’a pas répondu. Je suis retournée chez moi. Entre deux sanglots, j’ai appellé une de mes voisines. Elle est venue de suite. Avec elle, j’ai pu me moucher, demander aux filles de terminer leur fruit, d’aller se laver les dents, sans crier. Puis j’ai donné la tétée à A. pendant que la voisine lisait l’histoire du soir aux plus grandes. Dimanche, pour la première fois de ma vie, j’ai payé une baby-sitter, pendant 5 heures, pour être avec moi à mes côtés : faire une promenade, donner le bain, faire à manger, lire une histoire, en étant à deux.

Quand je raconte ces scène à Y. on sent qu’il est partagé : il voit bien que je suis fatiguée mais se demande si payer des baby-sitters à tire-larigot va changer quelque chose. Moi je sais que oui. Je préfère encore vider le compte en banque et avoir des enfants tranquilles plutôt que de me transformer en furie et avoir « la main leste » comme le faisait ma mère, pour ne pas dire qu’elle nous battait et que tout le monde trouvait cela normal.

J’ai mis en place différentes choses : j’ai fait des analyses sanguines pour détecter une possible anémie (j’ai un taux de 55 qui me parait bas, même s’il est dans la norme) prendre des compléments alimentaires, me coucher plus tôt et me lever plus tôt, (justement pour prendre du temps pour moi). Je me donne un mois.

Dans un mois, je ferais le bilan, voir si j’ai bien fait et si j’arrive à sortir de cette immense fatigue.  

 

Commentaires

1. Le dimanche, 25 juin 2017, 11:53 par Arkadia

Non tu n'es rien de tout ça, juste une maman avec des enfants en bas âges qui les élève très bien.

2. Le dimanche, 25 juin 2017, 16:17 par Dame Ambre

Comme je compatis.. l'envie de fuir me prend si souvent..
Des pensées douces, d'une maman épuisée à une autre.

3. Le dimanche, 25 juin 2017, 20:39 par Martine 68

Je compatis ...Il fut un temps où il y avait des tantes, des cousines, des grand-mères pour soulager ...un temps aussi où les enfants pouvaient aller jouer dehors avec des potes du même âge ...D'être bcp ensemble dans un espace restreint, difficile ...Sans compter que les enfants ont le chic de sentit les failles, de s'y engouffrer et de tout faire péter ...Vs avez certainement bien fait d'appeler au secours, cela ramène le calme et l'apaisement à toutes ....Et arrêtez de vous culpabiliser bonne ou mauvaise mère : on fait comme on peut avec son histoire et le caractère de ses enfants ...Courage !!!

4. Le lundi, 26 juin 2017, 18:01 par clem

C'est quoi ce 55 sur ton analyse de sang? Je m'y connais en anémie, tu peux me demander conseils.
Ahlala, c'est si dur parfois... je compatis Marloute.

5. Le jeudi, 29 juin 2017, 10:05 par Althéa

Très touchée par ce que vous traversez. Que c'est dur ces moments-là. Vous faites comme vous pouvez... Vous faites preuve de créativité, c'est une très bonne idée, la babysitter pour aider... Je trouve aussi que nous sommes très isolés, dans nos appartements clos. Je me vois dans des situations similaires, dépassée, avec ces larmes et ces enfants affolés, qui en rajoutent sans le vouloir. Vous savez que ça passera, vous avez pu expérimenter, déjà, que dès fois, tout roule. Ces moments reviendront un jour. En attendant, je vous envoie de douces pensées, pour vous.

6. Le jeudi, 29 juin 2017, 13:12 par Marloute

Merci à toutes pour vos petits mots....

7. Le lundi, 3 juillet 2017, 20:49 par clara

Deux produits qui m'ont aidée quand j'étais un peu dans le même état : le magnésium (la fatigue et la dépression bouffent tout le magnésium et entraîne encore plus de fatigue) que tu peux prendre sous forme de nigari, c'est vraiment efficace. Et le millepertuis, l'anti dépresseur naturel. Essaie. Vraiment. Et plein de courage...

8. Le dimanche, 9 juillet 2017, 10:19 par Chantal

Je viens seulement de lire votre dernier billet aujourd'hui. J'espère que vous allez mieux.



Quelques réflexions :
Non, vous n'êtes pas une mégère, ce genre de personne ne se qualifiera jamais ainsi.
J'ai l'impression que le jugement de vos parents sur la façon d'élever vos enfants vous a blessé -vous parlez de leur regard horrifié- et vous a fait croire que vous étiez dans l'erreur. Et, par conséquent, vous tentez d'obtenir par la force, la menace, les cris... leur obéissance. Et vous dites que cela ne change rien et qu'en plus votre aînée est triste.
Peut-être -surement même- a-t-elle senti tout cela même si peu en a été dit : vos parents horrifiés, vous perdue et elle s'est engouffrée dans la faille. Les enfants sont très doués pour ça.
Reprenez ce que vous pensez bon pour vous et vos enfants et laissez les autres, vos parents compris, pensez ce qu'ils veulent. C'est leur problème, pas le vôtre. Au final, est-ce si important de se laver les mains, de se mettre en pyjama, de se brosser les dents tous les jours, plusieurs fois par jour si c'est au prix de la tristesse de tous et au jugement porté sur vous. Peut-être voir ce qui est vraiment important à vos yeux et accepter de laisser tomber le reste, pour un moment au moins, le temps que les choses reviennent dans l'ordre : moins de fatigue pour vous, des jeux et rires ensemble, de l'humour, de la distance. Et lorsque les esprit seront calmés, en parler notamment avec votre grande et, petit à petit, remettre des règles (celles qui vous conviennent) en place.
Je crois que vous vous demandez beaucoup et à l'impossible nul n'est tenu. Soyez bienveillante avec vous.



Je suis très reconnaissante à la voisine, à qui vous avez téléphoné, venue vous donner un coup de main. Oui, c'est lourd d'être seule avec trois enfants dont les besoins, envies, rythmes sont différents. Et vous, dans tout ça ? Quand vous occupez-vous de vous ? Quand êtes-vous Marloute ? Et pas uniquement la maman, débordée, de vos enfants ? Essayez de ne pas vous en vouloir, la culpabilité et le sentiment de nullité n'arrangent rien.



Et je suis bien d'accord avec vous sur le fait de faire appel à une baby-sitter et de vous ménager, reposer, au maximum. N'hésitez pas, non plus, à voir autour de vous celles et ceux, en qui vous avez confiance, susceptibles de prendre le relais de temps en temps. Prenez grand soin de vous. Vous êtes une belle personne.



Je suis très touchée par tout ce que vous avez écrit dans lequel je me retrouve un peu, même si c'est loin derrière moi.



Je me permets de vous embrasser et vous souhaite un beau dimanche, tranquille, calme, sans rien faire de spécial ou seulement si vous en avez l'envie.

9. Le lundi, 10 juillet 2017, 07:51 par Marloute

@Clara : oui je carbure au magnésium et millepertuis. les deux me font un bien fou, je viens de les terminer et vais vite vite en racheter ! Tu fais bien de me le redire !

@ Chantal : merci pour votre commentaire qui m'a beaucoup touchée... Oui je dois prendre soin de moi, je n'ai pas le choix !