En avant !

La fatigue s’est refermée autour de moi comme une pieuvre visqueuse.

Je sens sa grande main me tenir dès le réveil. Il me faut lutter pour sortir du lit, alors qu’il est bien après 8h30. Dans une semaine, tout ceci n’existera plus : R. ira à l’école, et même si son père, m’a promis, juré craché, qu’il l’emmènerait chaque matin que Dieu fait –quand il sera là, qu’il n’aura pas de reportage aux aurores ou qu’il ne sera pas tout simplement trop fatigué – je sais que je ne vais pas rester au lit si R. est réveillée.

Mes vacances m’ont pourtant reposée en profondeur. Je me sens heureuse et légère de travailler. J’aime toujours autant mon travail, c’est une bénédiction de commencer ses journées avec cette légère excitation et ce plaisir par anticipation, de ce qu’on va lire, apprendre, interroger ou interviewer dans la journée.

Ce soir, j’ai eu longuement D, l’ancienne ass’mat’ de R. au téléphone. Elle me remerciait pour la lettre que je lui ai écrite avant notre départ, qui l’avait fait pleurer et qu’elle avait montrée au RAM, qui l’avaient photocopiée. Nous nous sommes raconté nos vacances respectives, et j’ai prévu de passer la voir avec R. dans une dizaine de jours. R. a passé plus de temps avec elle qu’avec moi depuis sa naissance. Et même si je reste sa maman, je pense que R. lui a été profondément attachée. La semaine dernière, j’ai rencontré une nounou, une femme qui m’a inspiré confiance, et que j’ai embauchée dans la foulée. Il y a tant à régler : les placards de R. sont encore dénudés, et j’attends les vides-greniers de certains quartiers parisiens, comme le 15ème, pour refaire sa garde-robe.

Ce soir, ma petite fille revient de 10 jours chez ses grands-parents.

Pendant son absence, avec Y. nous n’avons pas chômés : sorties avec les copains, tournées des bars, cinémas jusqu’à plus soif, restaurants, balades en amoureux dans notre ancien quartier, et même une visite d’expo (Lichtenstein, en nocturne !) que j’ai réussi à caler en sortant du travail. Au téléphone, R. m’a dit très distinctement qu’elle avait « donné à manger aux biches ». J’en déduis qu’elle a fait cette fameuse visite promise par ses grands-parents au Parc de la tête d’Or, le même où j’allais petite, et où je nourrissais les mêmes daims malgré l’interdiction de leur donner un bout de pain. De mon coté, j’ai fait beaucoup de ménage, et surtout traité entièrement l’appartement contre les puces. Reste à acheter une ou deux paires de rideaux, et nous serons parés pour l’hiver qui s’annonce. Avec tout cela, je n’ai quasi rien avancé sur mon enquête. Je voudrais caler une dizaine d’entretiens dans le mois qui vient, et je trouve que je fais tout au ralenti.

Pourvu que cela passe, c’est maintenant qu’il faut avancer !