Le Ciel

Le merveilleux week-end n’a pas réussi à chasser les nuages du quotidien.

Ce n’est pas faute, avec l’amie, d’avoir cherché à éviter les sujets qui fâchent. Nous nous sommes dorlotées l’une l’autre, à grand coups de thé, de crumble et de shopping déco. Nous revenons, R. et moi, du Grand Ouest,  dans un train bondé où les voyageurs s’endorment. Je cherche à endormir la petite, lovée contre mon ventre, dans une berceuse sans fin, en vain. Elle séduit un jeune couple dans le wagon, à qui elle prête par intermittence son doudou qui sent si mauvais, ravie.

Elle s’endort enfin dans le taxi alors que se lève la tempête. Sous l’averse, je paye et m’extrais difficilement, avec deux sacs, un petit enfant dont la tête dodeline dangereusement, effleurant la portière. Je la couche habillée et m’endors aussitôt seule dans le grand lit, pour me réveiller 8h plus tard, le ventre en vrac. Ce matin, il y a Marine Le Pen sur les ondes d’Inter. J’éteins. Y. est parti jusqu’à demain soir et j’emmène la petite sous la pluie battante.

Ce matin. L’ascenseur de la nounou est cassé. 7 étages à pieds.

Ce matin, le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle et je voudrais réciter par cœur le poème de Baudelaire, mais je ne le connais pas par cœur. Alors je vous le remets là.

 

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle

 

Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,

Et que de l'horizon embrassant tout le cercle

Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

 

 

Quand la terre est changée en un cachot humide,

Où l'Espérance, comme une chauve-souris,

S'en va battant les murs de son aile timide

Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

 

 

Quand la pluie étalant ses immenses traînées

D'une vaste prison imite les barreaux,

Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées

Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

 

 

Des cloches tout à coup sautent avec furie

Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,

Ainsi que des esprits errants et sans patrie

Qui se mettent à geindre opiniâtrement.

 

 

– Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,

Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir,

Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,

Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.

 

 

  

 

 

Commentaires

1. Le mercredi, 26 septembre 2012, 07:23 par Valérie de Haute Savoie

Ah ce poème, toute mon adolescence, que j'aime lire ces mots sombres.
Il pleut tous le temps à Paris dis donc !