Débriefing de Noël

Ambiance ambiance.


Pays de l’Ain noyé sous les brouillards givrants qui nimbent de glace chaque rameaux. Je m’émerveille des guirlandes électriques qui entourent la maison familiale pour une ambiance féerique. Le petit sapin, dans son gros pot de terre, ressert vaillamment chaque année.
Je retrouve le jeune chien de 5 mois, un mélange de labrador et de berger allemand, "un croisé porte et fenêtre", comme dit ma mère. C’est un chien intelligent qui s’ennuie, un chien qui n’attend qu’un maître suffisamment ferme pour le dresser.
Ce chien est entré cet été par effraction dans la famille, imposé par ma toute petite sœur qui a décidé que c’était son chien.
Résultat, mes parents s’en occupent et ma sœur ne paye ni sa nourriture, ni le vétérinaire. Je me demande comment elle peut dire que c’est son chien, puisqu’il passe plus de temps avec mes parents qu’avec elle, qui se partage entre son internat lointain et son petit copain qui habite plus loin encore.
Je m’occupe comme je peux du chien, essaye de lui inculquer une ou deux règles : on marche au pas avec la laisse, on vient quand on appelle, on s’assied quand le maitre le demande, et on « DONNE » le bâton au lieu de partir le manger à l’autre bout du jardin.
Ca peut paraître idiot ce dressage, mais je sais que c’est pratique. Quand le chien s’apprête à déchiqueter un lapereau, connaître « Donne » peut sauver la vie du bébé lapin. De même « assis ! » quand ledit chien s’apprête à traverser la nationale…
Je le dresse avec des croquettes. Une croquette quand il a bien exécuté l’ordre. Puis je lui donne une croquette toutes les deux fois. Le reste se négocie en caresse, ce qu’il apprécie tout autant. Au bout d’un moment, les caresses suffisent et le chien est heureux d’obéir.
Chez mes parents, je débranche la live Box, dont le Wi-fi ne sert à personne, en plus d’envoyer des ondes électomagnétiques en plus dans la maison qui en a déjà assez. Mon père est parti pour toute la saison à la montagne. Je nettoie son bureau, j’arrange la chambre d’amis où je dors.
J’ai mis du temps à obtenir de mes parents un « coin où dormir », mais maintenant c’est fait.
Pendant ce temps, ma toute petite sœur a annexé deux chambres, l’une sert de fumoir, l’autre de débarras. Je m’occupe de son rat qui se morfond dans sa cage. Je lui ramène du dehors un peu de mousse, des noisettes à grignoter pour se faire les dents. Je le sors plusieurs fois par jour, lui faire découvrir d’autres lieux, d’autres senteurs. Il a l'air plus heureux
Je fais le ménage pour aider ma mère, mais cette maison est désespérante. Il faudrait tout jeter, tout revoir, tout organiser.
Et surtout : ce n’est pas chez moi.
Je dépoussière encore un moment et tombe malade.
Et cela me sauve.
Un bonne vieille gastro entérite de derrière les fagots, la maladie honnie du réveillon de Noël. Je passe ma journée du 24 à comater et à vomir. Le soir, je mange sur le bout des dents le repas de réveillon, que je vomis bien évidemment. Je reste contagieuse et le lendemain, j’enrage de ne pas pouvoir prendre dans mes bras le bébé de ma cousine. C’est le premier petit enfant, une petite fille de 8 mois, au visage poupin et aux grands yeux gris de chaton étonné.
Autour de la table, on écoute ma grand-mère maternelle nous raconter, pour la première fois et en pleurant, à quel point ses Noël à elle étaient horribles. Sa mère ne l’aimait pas et que son père buvait. Ambiance « festen », révélations à l’appui, on apprend des secrets de familles enfouis depuis plus de 70 ans dans le regard terrifié d’une petite fille de 7 ans. Tout le monde pleure autour de la table en serrant notre grand-mère.

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Je comprends mieux, grâce aux mots de ma grand-mère, les maux qui entravent mon propre lien à ma mère. Ainsi se défont lentement les secrets de familles, ainsi s’écoule le fiel retenu si longtemps.
Le café a le gout des larmes, mais tout le monde est soulagé. C'est un peu comme on savait, quelque part, inconsciemment, la violence subie, et la tension des Noël d’antan.

Après m’être engueulé une ou deux dernières fois avec ma mère, je rentre enfin à Paris.
5 jours.
J'ai passé 5 jours là-bas.
5 jours à la fois tendus et agréables.
5 jours chez ma mère, comme dirait l’autre….



Commentaires

1. Le jeudi, 27 décembre 2007, 23:25 par karmara

Je ne réapprends à aimer Noël que depuis que j'ai des enfants...

2. Le vendredi, 28 décembre 2007, 11:48 par Marloute

Oui, je comprends. J'espère que moi aussi je ferais passer de bons Noel à mes enfants et que je ne leur crierait pas trop dessus.
C'est pas encore gagné gagné, j'ai pas mal d'années d'analyses à faire encore avant de régler ces problèmes de violence...

3. Le vendredi, 28 décembre 2007, 15:40 par Oxygène

Ne penses-tu pas que ta grand-mère vient de te faire gagner quelques années d'analyse ? C'était courageux de sa part d'ouvrir ces secrets qui libèreront une partie du poids que tu portes. Bises.

4. Le samedi, 29 décembre 2007, 01:47 par karmara

Tu as raison, c'est bien de déblayer un peu le terrain avant de semer à son tour (moi je l'ai fait après la première récolte et j'aurais été bien inspirée de le faire plus tôt :-)). Déjà rien que le fait de mettre le doigt sur ce qui risque de merdoyer permet de mieux gérer les situations. Parce qu'on connaît les risques de dérapage et qu'on peut dire stop avant.