Après la tempête

Vendredi matin, de retour de mon dernier rendez vous chez ma psy du travail, j’ai retrouvé Y. et R. Ma petite fille a la varicelle et nous nous sommes partagés la semaine à ses côtés avec son père. Elle n’a pas toujours été gentille, enchaînant les crises, ivre de sommeil de ne jamais accepter de faire la sieste alors qu’elle en aurait besoin, se couchant à 23h et se réveillant en pleine nuit, gémissant auprès de nos oreilles parce que les boutons la démangeaient.

Pauvre cocotte.

Nous avons traversé la maladie avec courage, nous relayant auprès d’elle dans le grand lit pendant que l’autre allait grappiller quelques heures dans le sien.

Toute la journée de vendredi et une partie du samedi, j’ai senti un malaise grandir en moi. L’absence de Y. qui faisait une émission tard et a enchaîné en buvant une bière avec ses collègues, m’a miné. Idem le lendemain quand il est parti au matin faire ses cadeaux de Noël, comme à son habitude depuis 12 ans que je suis à ses côtés, le dernier samedi avant Noël. Je me sentais mal, mal, mal. Je n’arrivais pas à formuler, à expliquer, ce grand mal-être alors que les vacances tant attendues commençaient enfin. Il y avait tant à faire ! Mais je me sentais abattue, sans ressource, désespérée. Quand il est revenu dans l’après midi, j’étais comme une louve blessée. Je ressassais, incapable de dire mon malheur, pouvant seulement critiquer tout ce qu’il faisait. Nous sommes partis ensemble voir un ciné concert, où se rendaient tous les parents de notre petite commune. J’étais de plus en plus triste, et nous nous sommes violemment engueulés pour un motif futile. Tout à coup, je voulais mourir. Me jeter sous une voiture, m’éclater contre un mur, prendre mes clés et fuir, fuir loin de ma petite fille et de mon compagnon, maintenant que nous étions –enfin- tous les trois réunis pour plus d’une journée.

Enfin, en marchant, j’ai pu dire que j’allais mal, et Y. m’a consolée, mais je gardais cette mélancolie profonde, comme une mélasse, qui me collait à la peau au retour.

Le soir, en mangeant tous ensemble, nous parlions de parents croisés au ciné, des professions des uns et des autres, et soudain, j’ai compris.

Soudain, comme un ciel se déchire, j’ai analysé et compris les raisons de mon désespoir aussi vif que soudain et ce sentiment de perte atroce qui m’empêchait d’un coup d’avancer.

J’avais arrêté, la veille au matin, une psychothérapie d’un an, avec une personne extraordinaire, qui m’a portée littéralement pendant tout le temps qu’à duré le harcèlement de P. Nous étions toutes les deux satisfaites du résultat, il n’y avait pas de raison de continuer ce travail, une thérapie courte, plus longtemps.

Mais les liens qui se nouent en thérapie, ce qui se passe dans le huis clos de la séance, ce qu’on dépose comme fardeau et cette relation qui se crée est difficile à quitter.

J’ai compris que j’étais triste de savoir que je ne verrais plus M., sauf en cas de pépin à nouveau.

Comme un bébé, je vivais cela à nouveau comme un abandon.

M’en rendre compte m’a illuminée. Tout à coup, je passais de taciturne à volubile, je passais mes bras autour du cou de R., qui était ravie à son tour de retrouver sa maman, la vraie, pas cette ombre d’elle-même qu’elle côtoyait depuis 24h. Depuis, je me sens heureuse et apaisée, prête à profiter de ce temps de vacances, ce temps de fête, ce temps de Noel. Prête à prendre ce qui vient et réattaquer mon cher travail dans très longtemps, 10 jours, la fin du monde.

Heureuse enfin. Avec une pointe de tristesse, mais aussi un bonheur calme, comme après la tempête.