On y arrive

Je me brûle la langue avec la chorba de la nounou.

La pauvre a du avoir pitié de moi ce soir, rentrant exténuée avec mon barda sur l’épaule, mes chevilles douloureuses de trop porter de talons, mon maquillage perdu en route et cette petite fille si mignonne la journée qui me fait vivre un enfer le soir. La nounou m’a donné de la chorba délicieuse et parfumée de coriandre fraîche. Elle a ajouté 5 petites briques à la viande, qu’il aurait fallu faire cuire dans la grande poêle avec de l’huile, mais ça, je n’ai pas eu la force. J’ai juste fait réchauffer le bouillon, regardé une émission sur Arte + 7 et je m’apprête à me coucher.

Hier soir, pour l’apéro et le dîner, deux copines célibataires-célibattantes sont passées. J’étais ravie de leur présence, après ma journée fériée passé à me battre avec ma mini-furie. Crise pour s’habiller, crise pour enlever/remettre une couche, crise, crise, crise. Je me sentais seule, si seule,  je m’accrochais à mon but : passer un pull, enfiler une manche. Et puis j’ai compris que je n’arriverais à rien. J’ai emmenée ma petite fille toujours hurlante au salon et je l’ai laissé crier dans mes bras. Bloquée contre moi, elle enrageait, rouge, écumante, échevelée et morveuse. Petit à petit, ses cris de rage se sont transformés en sanglots, des larmes libératrices sont arrivées. Elle s’est blottie plus franchement et a fini de pleurer. Au bout de quinze minutes, elle a relevé la tête pour voir passer le chat, comme si tout à coup rien ne s’était passé.

Moi j’étais vidée.

Personne ne prend en charge mes crises à moi. Moi aussi j’aurais besoin de sortir de la rage, de la tristesse, de l’inquiétude et j’en passe. Parfois, j’aurais besoin de crier et de taper sur quelqu’un. Je me sens nulle et impuissante. L’amie avec qui je suis brouillée n’a pas répondu à mes messages sur son répondeur.

Je n’ai pas voulu l’embêter plus longtemps. Y. me manque, il n’appelle pas, mais ce n’est pas trop grave, j’ai l’habitude.

Alors, pour sortir mon trop-plein, je parle.

A 16h, ma voisine a eu la bonne idée de passer boire le thé, avec sa petite qui a le même âge que R. et fait le même cinéma.

Je raconte autour de moi à quel point c’est difficile, à quel point je sens que mes limites sont là, et autour de moi, je reçois des échos inattendus. Ce week-end, j’ai lancé un appel à l’aide, et il seront plusieurs à se relayer chez nous pour que je puisse faire quelques tâches dans l’appartement. Parfois, j’ai un peu honte.

Les autres mamans ne font pas appel à tout leur réseau chaque fois quelles doivent passer quelques heures avec leur enfant. Je me trouve petite et faible, mais c’est bien là le truc, je suis petite et faible, j’ai besoin d’aide pour élever mon enfant. A défaut d’avoir moi-même la maman bienveillante qui pourrait me décharger quelques heures, je me repose sur mes amis.

Ce soir, une fois son repas pris, ma toute petite était un ange, elle gloussait sous mes doigts, les jambes emmêlées sur la couette du grand lit. Ce soir, j’étais contente de moi, finalement.

Avec de l’aide, on y arrive.

  

Commentaires

1. Le samedi, 19 mai 2012, 09:14 par chrysante

Lectrice régulière mais silencieuse, pour une fois, j'interviens ... ton billet me touche car il me renvoie aux premières années de mes fils (17 mois d'écart). Tout comme toi, peu d'aide à disposition. Et surtout, je n'ai pas osé demander. Alors, je salue ton geste :-) Tu n'es ni faible ni petite :-) J'espère que tu passeras une belle journée :-)

2. Le samedi, 19 mai 2012, 14:55 par Marloute

@chrysante : merci! et bienvenue ici!

3. Le lundi, 21 mai 2012, 10:42 par Sacrip'Anne

On a tous besoin d'aide. Particulièrement en phase aigüe de "Terrible Two".

Et c'est essentiel que de le savoir et d'appeler, à l'aide. Plutôt que de vouloir faire comme si et se faire du mal / faire payer à l'enfant.