Les quelques jours de vacances

Je suis partie en vacances, alors que je sais qu’à mon retour, ce sera l’horreur, il faudra travailler d’arrache-pied pour pouvoir faire tout ce qu’il y a à faire.

Je suis partie en vacances quasi pas contente, pas heureuse, avec une boule au ventre. Je suis partie en vacances, et j’ai eu du mal à réaliser, ces quelques jours en famille, retrouver L., ses grands sourires, découvrir ses trois dents qui sortent dès le samedi, sa bave et son babillage qui s’intensifie, et sa marche à quatre patte qu’elle a perfectionne pendant le séjour. Retrouver R., ses chansons et ses bavardages, ses questions, ses bouderies, et plusieurs fois m’énerver contre elle, et puis plusieurs fois la prendre dans mes bras pour terminer un repas collées-sérrées et se câliner longuement, chose que je n’avais plus le temps de faire ces dernières semaines. Prendre des vacances et retrouver un peu Y., qui se casse la tête pour nous toutes, qui assure sur tous les fronts et me rassure en permanence. On commence à rêvasser : prendre une petite maison en bord de mer, lancer ma chambre d’hôte tandis qu’il demanderait une mutation en Bretagne. Élever les enfants à la campagne, au bord de la mer, Je commençais juste à me détendre quand j’ai eu un coup de fil du boulot, de ces coups de fil qu’on redoute, parce que d’un coup, ils ne sont plus sur, ils demandent des explications, des précisions, et moi je suis loin de tout, loin d’une connexion internet, et cela me glace le sang et je voudrais rentrer au travail, vérifier par moi-même, mais c’est impossible, je suis en vacances. Retourner à ma table de restaurant. Ne pas manger. La nuit, ne pas dormir, la journée du lendemain, répondre par monosyllable aux gens qui m’entourent.

Je me demande bien pourquoi je me sens si incapable. A mon retour, toujours dans le cabinet de Mme N. je pleure sans discontinuer. L’idée de devoir retourner travailler me paralyse et me fait trembler de la tête aux pieds. Je ne veux pas. Je ne veux pas.

Chaque soir pendant un mois, j’ai demandé à Y. si je ne pouvais pas tout simplement démissionner. Ce poste de rêve, devenu un cauchemar à mes yeux parce que je ne me sens pas capable de le faire, est terrible. Mais il me dit qu’une fuite ne serait pas la bonne solution. J’entends, mais cela me terrorise.

 

Mme N. me parle de la « petite Marloute ». L’enfant qui affleure quand je parle et quand je pleure, celle qui a peur, qui a pris trop de coups et trop d’insultes, et qui désormais n’ose plus jouer, n’ose plus rien essayer, de peur d’échouer.

J’aimerai que la petite Marloute s’apaise et ne sais pas comment la calmer.

Hier, nous avons mis R. dans le train, seule, pour partir au ski chez ses grands-parents. Depuis, j’erre comme une âme en peine, il me manque un bout de moi, je sniffe son pyjama, contemple, désolée, ses jouets ou son dernier dessin comme si elle ne reviendrait jamais. On est samedi et je voudrais déjà être au travail au lieu de profiter de ce week-end.

Je me demande quand est ce que je vais sortir le nez de cette tempête.

 

Commentaires

1. Le samedi, 21 février 2015, 10:16 par Arkadia

Je ne te connais pas, mais as tu pense au bilan de compétences pour faire une sorte de point professionnel ? . Pour le reste, nous sommes allez au bout de notre projet et quand on a un truc qui trotte bah, peut être que pour éviter tout regret de ne pas l'avoir fait autant se lancer. La Bretagne c'est beau !

2. Le samedi, 21 février 2015, 17:44 par Marloute

@Arkadia : c'est courageux et chouette de vous êtres lancés, comme tu le dis. Le souci, moi, c'est qu'en vrai, je ne rêve même pas de cette chambre d'hote, . Je cherche juste un moyen d'échapper au stress, parce que mon travail, quand je sais le faire et que je le fais bien, me passionne... J'aurais l'air maligne, dans ma maison, loin de tous, et seule avec mes enfants sur qui je pourrais crier à loisir... Je suis sûre que je ne serais pas plus épanouie. Non, il faut vraiment que j'arrive à me sortir de cet état où je suis plongée depuis ma reprise et que je me reprenne justement....

3. Le samedi, 21 février 2015, 19:39 par Solete

Marloute,

Je me permets de commenter, car je me sens tellement identifiée dans tes posts. La différence, c'est que moi j'ai fui et que, comme tu le dis plus haut, je ne suis pas forcément plus épanouie et que parfois je regrette ne pas avoir avoir sauté davantage dans le grand bain, mais je sais que c'était au-dessus de mes forces et que ça l'est encore souvent aujourd'hui. Donc, j'admire toute la force que tu réussis à réunir pour faire tout cela.

Un exercice de visualisation qui me fait du bien, c'est : m'imaginer petite un instant ou penser à un aspect que je n'aime pas de moi, me concentrer dans la zone de la poitrine (du coeur) et sentir de la tendresse/de l'amour, quand j'inspire j'envoie de l'amour à la version de moi enfant ou à ce "défaut", quand j'expire je créé l'image de le prendre dans mes bras. S'envoyer un peu d'amour et de tendresse, ça fait du bien.

Je t'envoie plein de courage.

4. Le dimanche, 22 février 2015, 20:14 par Anita

Marloute, comment te rassurer, te faire croire en toi ?
Je crois, moi aussi que tu n'as pas envie de cette chambre d'hôte, tu veux juste t'échapper...
Et si tu abandonnes, est-ce que la petite Marloute sera pour autant apaisée et heureuse ?
Je me souviens t'avoir vue lors d'un Paris-Carnet, et j'ai alors pensé "Quelle jolie fille, elle a la gniaque, tout va lui réussir".
Et si tu croyais en toi, si tu t'échappais de cette dépression ? Quel est donc l'obstacle ?
Bon courage chère Marloute, je sais, moi, que tu peux y arriver.
A toi d'y croire aussi.
Je t'embrasse amicalement.

5. Le lundi, 23 février 2015, 17:11 par Hop ale

Courage Marloute,
Parfois la vie nous impose des epreuves juste pour nous rendre plus forts. A je me souviens d'une jeune femme qui travaillait dans une petite supérette en espérant avoir un vrai poste de journaliste, qu'elle a eu plus tard. Je me souviens d'une jeune femme qui prenait soin de son intérieur, qui triait, rangeait, huilait son parquet, en espérant pouvoir un jour le faire dans le sien. Elle l'a fait et il est très beau d'ailleurs son appart. Je me souviens d'une jeune femme déjà maman en dedans: qui cuisinait à merveille et chouchoutait les siens. Elle est devenue une maman très consciencieuse ensuite.
Tout ça tu le sais, c'est toi. Continue à essayer, à espérer, à pleurer, à tomber et à te relever. Aie confiance. Grosses bises.

6. Le mercredi, 25 février 2015, 08:50 par Marloute

Ouh bhin dites donc, ça fait chaud au cœur tout vos messages. J'en ai bien besoin aujourd'hui, c'est l'entretien d'évaluation, je vais essayer de visualiser (c'est vrai que ça fonctionne Solete, je l'avais déjà fait, c'est assez bluffant!)...
Hum, bon, pour le reste, je dois me reprendre, de toute façon : JE N'AI PAS LE CHOIX.

7. Le dimanche, 8 mars 2015, 16:28 par Aventura

Il n'y a jamais aucune raison, vraiment aucune, à rester dans un travail qui nous angoisse, nous paralyse, et nous fait trembler.
Aucune.

Fuir, c'est courageux, parfois.

A des malades en fin de vie, en soins palliatifs, on demandait ce qu'ils regrettait le plus de leur vie d'avant.
Aucun n'a cité son travail.

On a toujours le choix.
Surtout celui de se donner le choix.