Les larmes laveront tout

La journée d’hier était placée sous le signe des larmes.

 Le matin, j’avais rendez vous à la nouvelle maternité, participer à une réunion sur la césarienne. En fait, sur la dizaine de jeunes femmes présentes, seules trois en avaient vécu une, les autres étaient des primipares qui écoutaient, les yeux grands ouverts, nos témoignages plus ou moins poignants sur nos expériences respectives. Une seule femme a expliqué qu’elle avait très bien vécu la chose. L’autre a parlé de violence, de douleur, d’un sentiment de culpabilité et d’incompréhension. Moi j’ai évoqué la brutalité de l’acte, le sentiment de peur, la distance que cela a crée avec mon bébé. Il a fallu respirer un grand coup pour développer ces propos devant une assemblée de femmes enceintes plus ou moins réceptives.

La psychologue présente a de nouveau minimisé les choses, expliquant au groupe que cette opération (banale) est vécue différemment selon le vécu des femmes. Je suis d’accord pour une part. J’ai des fragilités personnelles - une opération mal vécue quand j’étais encore un petit nourrisson, une séparation forcée avec ma mère - qui ont fait que je l’ai très mal vécue. Mais je pense qu’en France, on ne traite pas encore le corps des femmes comme on traite celui des hommes. Je pense que certains actes pratiqués en routine perturbent profondément le travail de l’accouchement et mettent en danger des mères et leurs bébés. Cette médecine patriarcale me hérisse.

Le soir, j’avais rendez vous avec la nouvelle psy. Au détour d’une phrase banale sur le vécu de ma dernière consultation gynécologique, je sens une énorme émotion monter. La psy s’arrête de parler et demande d’une voix douce : "Je vois que vous êtes bouleversée, à quoi pensez-vous ?" Bien sûr, bien sûr, entre deux hoquets et sanglots, il a bien fallu parler de cela. 5 années d’analyses n’ont rien effacé des violences subies. Une fois la crise passée, il a fallu élaborer ensemble les possibles attitudes, pour ne pas subir à nouveau, si je dois en passer encore par la césarienne, si ce bidon doit de nouveau être coupé pour sortir un bébé, mon nouveau bébé.

 

Tout n’est pas terminé.

Chaque jour je creuse, j’explore, je découvre, je pleure les anciennes blessures, je cherche à me bâtir, à me construire, à me comprendre, malgré tout, pour que mes enfants, mes proches, puissent à leur tour bâtir eux aussi.

 

Mais tout de même, tout de même, c’est difficile.

 

Il est long, si long ce chemin que chacun suit, et qui s’appelle la vie !

 

 

Commentaires

1. Le mardi, 4 mars 2014, 12:37 par Oxygène

Courageuse Marloute ! Si je ne commente pas souvent, je n'en suis pas moins admirative du chemin que tu parcours.

2. Le mercredi, 5 mars 2014, 15:10 par Oxygène

Et j'ajoute que tu as raison, les larmes lavent tout. Elles permettent aussi au trop plein de fonctionner pour"vidanger" les chagrins.