Maternité

Il y a eu le sentiment d’étrangeté. Le nouveau-né qu’on a de la peine a appeler « mon enfant ». Il y a eu le sentiment terrible de perte de la liberté, parce que j’ai cru qu’il fallait rester auprès de ce tout-petit, que sans moi elle serait perdue, se sentirait abandonnée. Il y a eu la perte des repères dans le couple, où sont nos places respectives, qui fait quoi et comment. Il y a eu l’inquiétude réelle et des larmes terribles quand je me suis demandé à haute voix : « Je ne sais pas si je l’aime, ma vie n’a plus de sens, je ne sais pas où j’en suis ».

Et puis, depuis quelques temps j’ai compris.

Non, je ne suis pas la mère que j’avais rêvé être.

Mais ce n’est pas une catastrophe.  

Choisir des habits ne m’intéresse pas, pas plus que d’imaginer sa chambre.

Lui raconter des histoires, babiller oui, mais cela ne m’épanouit pas : je suis beaucoup plus heureuse quand je ferme la porte de sa chambre une fois endormie et que je bois un verre de Cabernet frais avec son père.

Je suis une mère « passable », pas mauvaise mais pas géniale.

Je l’embrasse, la câline, mais je la colle dans les bras de son père ou d’une baby-sitter amie dès que je peux, pour sortir avec mon meilleur ami.

Je m’émerveille de ses exploits, mais je préfère largement boire le café avec une amie pendant la sieste de l’après-midi.

Je préfère regarder des épisodes de Friends plutôt que de lui chanter des comptines.

Je suis une mère peut-être attentive mais surtout une amoureuse avant tout.

J’ai compris -enfin- que pour être une mère détendue, j’avais besoin de prendre soin de moi.

De décrocher, de me faire cocooner, pour pouvoir ensuite remplir le job de maman. Alors, j’ai fait tout à l’heure la liste des activités/sorties/petits plaisirs que j’allais m’accorder dans les semaines qui viennent.

Car j’ai compris que personne ne prendrait soin de moi. Sauf moi.

ET je crois que c’est le plus beau cadeau que je peux faire à R. : une maman heureuse. Peut être pas la plus géniale du monde. Mais heureuse.

Commentaires

1. Le lundi, 7 février 2011, 20:51 par clem

tu es franche, c'est admirable!...
en revanche, je pense, pour avoir eu quelques fois les mêmes sentiments que toi quand les miens étaient minuscules, qu'à mesure qu'elle grandira et sera encore plus en mesure de communiquer avec toi, tu vas prendre ton pied à l'observer, à jouer pleinement avec elle et à lui lire des histoires quand tu seras sûre qu'elle en comprendra tout. Même si, il ne faut pas se mentir, en parallèle, tu seras aussi très contente quand elle dormira et te laissera en paix.

2. Le mardi, 8 février 2011, 07:13 par Valérie de Haute Savoie

:D J'étais tout le contraire je crois ! J'adorais les papouiller, les trimballer, leur parler, les habiller, les laver. J'en ai profité profité jusqu'à plus soif. Maintenant ils sont indépendants, ils ne me manquent pas, j'aime les retrouver, j'adore les savoir heureux, mais, sauf le petit pincement au coeur quand ils s'en vont, je vis ma vie sans eux pleinement. L'essentiel est d'être bien avec soi même. Ne pas se forcer à un rôle qui ne convient pas. Tu es sa mère telle que tu es et c'est très bien.

3. Le mardi, 8 février 2011, 07:34 par Anne

T'as été vite pour en arriver à trouver la place de ton curseur, j'admire.

Et pareil, ça a été émerveillant, mais plus elle a grandi, plus on a communiqué, plus ça m'a plu comme "rôle de mère".

Là, vraiment, j'ai un plaisir de dingue à être sa mère, avec toutes nos discussions et notre vie à deux qu'on s'est faite comme on avait envie de la faire. Et puis on réfléchit, on imagine, je lui parle beaucoup, je réponds à ses questions.

C'est plus rigolo que les couches, je trouve :)

(Mais chacune son plaisir et ce qui compte c'est d'être une mère "raisonnablement bonne" !!)