Y. est parti

Ce soir, 22h, pour le deuxième soir consécutif, je couche R. dans son panier d’osier, à moitié endormie…. et elle S’ENDORT.

Le fait est tellement miraculeux qu’hier soir, je faisais des allers-retours entre la cuisine et la porte de la chambre, sans oser y croire. Peut-être l’absence de son père, parti pour la lointaine Tunisie l’a encouragé à me préserver un peu et m’éviter enfin ses crises de larmes épuisantes qui nous étrillaient depuis de trop longs mois. Bien sûr, R. se réveille encore aux petites heures du jour ou de la nuit, pour de longues tétées, rassurantes pour nous deux, mais je gagne du temps libre en soirée, et je savoure cela comme un condamné son sursis. C’est un fait étonnant avec R. : plus elle grandit et s’émancipe, donc me laisse de l’espace comme une forme de « respiration », plus je trouve le temps et l’espace de l’aimer. Un peu comme un amant trop étouffant, qui nous boufferait sans qu’on arrive à savoir si on l’aime un peu ou pas.

Pourtant, R. n’est qu’un nourrisson de trois mois, mais dans ses yeux gris bleus, remplis d’amour et de tout l’espoir du monde, je lis qu’elle comprend et pardonne, ma valse-hésitation, mes élans et mes brusques détours autour de la maternité. Parfois je m’étonne. Pourquoi n’ai-je rien vu ? Ou plutôt rien voulu voir des difficultés qui entourent le maternage ? La fatigue, la colère qui monte contre celui qu’on chérissait tantôt. Pourquoi ai-je cru que tout irait de soi : l’allaitement, l’amour, les liens du couple.

Non, rien de tout cela ne va de soi, et il nous faut tout réapprendre, nous, pauvres citadines trentenaires, loin de nos mères qui nous ont biberonné, et de nos grand-mères. Une fois trouvé le prince charmant, la partie est loin d’être gagnée. On plonge tout chaud dans l’huile bouillante de la vie et quand on sort la tête de l’eau, ce n’est que pour regarder autour de soi et se dire : mais comment font les autres ? Comment font-elles toutes ces femmes qui ont enfanté, se sont réveillées chaque nuit, ont eu des envies de meurtre contre « la chair de leur chair » ? On se sent nulle et dépassée par des choses anodines. On a peur, à chaque instant qu’il arrive quelque chose à ce petit paquet rose et braillard car on sent bien qu’on y laisserait une partie de soi.

Ce soir, R. s’est endormie.

Je me remets à peine de notre escapade deauvillaise. Malgré la douceur de notre quatre étoiles qu'avait trouvé Leeloolène, je ressens une étrange fatigue.

Y. me manque.

Hier, je suis allée retrouver une copine à Jaurès pour manger une souris d’agneau. Puis je l’ai accompagnée à Beaubourg et j’en ai profité pour voir enfin l’exposition Mondrian/De Stijl, qui ne m’a pas plu du tout, mais a beaucoup plu à R. Normal : les bébés aiment les lignes et les contrastes de couleur.

Depuis, j’écoute en boucle le titre « My name is trouble ». J’attends avec impatience la fin du mois de février pour écouter enfin l’album en entier. Ce matin, une copine est venue prendre le café, avant une prise de vue prévue avec lui. Stressée sans l'être, décrochant son téléphone, elle lui a parlé comme jamais je ne pensais qu’on parlait à une « star » Mais j'oublie souvent que cette copine est une des plus redoutable attachée de presse de la place de Paris. J’adore quand elle arrive le soir boire un coup et qu’elle se plaint sans en avoir l’air d’avoir du balader toute la journée un gars comme lui. Quelle vie !

Puis G. est arrivée à midi, manger un chili con carne que j’avais préparé avec amour. 12 heures de trempages des haricots, tout ça pour se brûler la bouche en rigolant, tant on a faim, tant c’est bon de manger un plat si plein de viande et si épicé.

Puis j’ai filé à Saint Ouen retrouver ma sage-femme et ses séances de rééducation du périnée, et j’en ai profité pour inscrire R. à la crèche. Elle passera en commission en juin, mais je sais que nos chances sont maigres, tant les bébés nombreux sur Paris et sa banlieue. En rentrant de Saint Ouen, j’ai acheté des magazines pour J. ma vieille voisine. J’ai fait un détour par sa clinique pour lui emmener. Puis je suis allée à la bibliothèque, ramener mes livres, en prendre de nouveaux, et profiter du temps de lecture parents-bébés avec R. J’ai honte, parce qu’en dehors de ce temps, une fois par semaine, je n’aime pas faire la lecture à R. Je préfère regarder des épisodes de SATC, avec R. qui se dévisse la tête pour regarder l’écran tout en continuant à téter. Ce soir, j'ai fini le roman "Mange, prie, aime" facile à lire et sympathique.

Y. est parti depuis 72heures, et je me débrouille plutôt bien.

Qu’en sera-t-il dans 10 jours ?

 

Commentaires

1. Le mardi, 1 février 2011, 07:54 par Akynou

J'écoutais Y à la radio. Et Lou me parlait. Nous étions dans la voiture. Et je lui ai dit : "tais-toi, y parle !" Sur le coup elle ne comprenais pas de qui je parlais. Alors je lui ai expliquais. Et je lui ai dit qu'il était en Tunisie. Et elle était surprise et en même temps super contente de connaître quelqu'un qui parlait à la radio et qui partait à l'étranger pour suivre une révolution ;-)