Tentative d'aménagement

Je câline la chatte. Elle me donne de grands coups de tête, emportée par sa tendresse. Frotte son nez mouillé, contre mon menton, ronronne à qui mieux-mieux.
Certains soirs, j’ai droit à de longues démonstrations. Elle et moi sur le canapé, elle pétrit mes genoux, frotte son museau, se couche à demi sous mes caresses. On la sent heureuse, malgré nos 40 mètres carrés.

Je me suis levée tôt ce matin. J’avais pourtant la bouche pâteuse, souvenir infime de la soirée d’hier, où j’ai dû rentrer à pied dans la nuit gelée, parce qu’on avait trouvé un « colis suspect » dans le métro. Je n’ai pas l’habitude de fumer des joints, mais hier soir, j’étais particulièrement tentée. Après avoir bu quelques bières, j’ai tiré aussi sur quelques pétards. Le dernier m’a littéralement scotchée, juste avant de m’enfuir dans la nuit retrouver Y. à la maison. J'écoutais les conversations dans le métro, hallucinant à moitié. Puis j'ai marché, marché, jusqu'à arriver devant ma porte, sans même songer à héler un taxi. Résultat, je ne sais pas exactement comment j’ai réussi à rentrer, mais je me suis réveillée presque fraîche, avec juste comme souvenir la puanteur infâme de la cigarette sur mes vêtements.

J’aère l’appartement. Passe un coup de balai. Fais le vide dans des vieux magazines. Je jette des sacs, des vieilles chaussures plus bonnes à rien. Prends mon sac à dos et vais m’acheter une pellicule photos. Du 200 ASA. Je passe à la bibliothèque. Prends un livre de photographies de Doisneau. Aux halles, j’achète des fruits et un maquereau, si brillant qu’on dirait qu’il va frétiller sur la galce où il repose. Revenue à la maison, je réveille Y. qui aura presque fait le tour du cadran. Je prépare le maquereau en papillote, avec une sauce au beurre blanc, en remplaçant le vin par du champagne, dont il restait un fond de la soirée-fille de ce mardi.
C’est pas mal.
Je fais avec ce poisson des brocolis sautés au beurre. Le tout est léger et gouteux. Je suis contente.
Puis je bois du café pendant qu’Y. fait la vaisselle. Je lis le livre de Doisneau, sur ce Paris qui n’existe plus. Pendant une heure, je ne fais rien d’autre que siroter du café en tournant les pages.
 


Le temps s’est arrêté.
Soudain, je me lève d’un bon.
Les soldes ont commencé !
Je vais acheter une paire de mignonnes chaussures à talons, et passe chez Guerissol, la friperie la plus populaire du quartier. Là, je tombe sur une paire d’escarpins magnifiques. Je les prends quand soudain, une autre m’attire l’œil…des Prada! Dans un très bon état, une superbe paire d’escarpins noirs à bout carrés m'attendent. De vrais Prada. Qui doivent couter une petite fortune à l’état neuf. Je n’en reviens pas quand je paye les deux paires d’escarpins. 10 euros. 10 euros les deux. Dans le bus du retour, je chantonne dans ma tête. J’ai des Prada, lalala... Je vais pouvoir faire la fière au boulot. Hum. Mais je ne dirais pas d'où elles viennent!