Le marché

Hier matin, je me suis levée très tôt pour aller faire les courses.
Y. était parti pendant la nuit présenter les journaux du matin à la radio.
Me lever tôt m’a rappelé mes années de célibataire.

Tous les dimanches, qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il neige ou qu’il fasse beau, je me levais à 8h. à 8h30, j’étais dans la rue, avec mon cabas à roulette, hérité de mon père. Dans tous les lieux, et mes différents appartements, à Lyon pendant trois ans, à Tours pendant un an, à Toulouse ou Rochefort, et à Lyon encore, je partais faire le marché. Les yeux souvent collés d’avoir trop peu dormi la veille, parfois avec des gens endormis dans mon salon qui avaient terminé la fête chez moi, parfois avec une sacrée gueule de bois. Je me glissais dans la brise fraiche du matin d’été ou j’affrontais le vent glacé de décembre, quand les commerçants se calfeutrent derrière des bâches de plastique et protègent leurs mains dans des moufles rembourrées. A Lyon, j’avais mon boucher tripier attitré. Chaque semaine, il me mettait de coté les pires cochonnailles : des tripes, des couilles de moutons, de la cervelle d’agneau ou de la langue. Dans la semaine, j’accommodais ces mets pour moi toute seule et je lui donnais mes conclusions la semaine suivante. A Tours, je m’étais fait copine avec une artiste fleuriste. J’avais passé une matinée un dimanche à la prendre en photo, avec sa complicité, tant j’admirais sa dextérité et sa créativité avec les bouquets de fleurs. A Tours, je me souviens aussi que je terminais mon marché en m’achetant une douzaine de chouquettes au sucre. Elles sortaient juste de la plaque du four et leur sucre caramélisé était tiède sous mon palais. Depuis que ma dépression, depuis Barcelone et mon arrivée à Paris, je ne fais plus le marché. Il n’y en aucun autour de moi et je ne veux pas prendre le métro pour faire mon marché. Je suis devenue paresseuse depuis que je vis en couple. Le dimanche matin, je préfère buller au lit. Dormir, terminer un roman ou un BD, rire avec mon compagnon.
Aujourd’hui, nous faisons les courses ensemble. Nous allons voir des primeurs trop chers à coté de chez nous, passons trop de temps au petit supermarché, pour acheter des choses dont nous n’avions jamais besoin avant. Je me souviens que ma première année à Lyon, je faisais mes courses en fruits, légumes et fromage pour toute la semaine avec 100 francs. Aujourd’hui sur Paris, avec 40 euros, je tiens à peine trois jours si je veux acheter du poisson. Cette semaine, j’ai acheté du cabillaud au lieu de la lotte, des moules car la saison commence, et j’en avais déjà pour 20 euros. La vie est devenue chère et surtout, je suis devenue plus paresseuse. Il est temps que je quitte les primeurs à coté de chez moi pour retourner au marché. Il est temps que je profite des cageots bradés, faire mes propres sauces et mes confitures… Bientôt, bientôt, bientôt….

Commentaires

1. Le mardi, 15 juillet 2008, 02:49 par Moukmouk

Tu as raison. Il faut refaire les gestes simples, tisser les liens qui donnent un sens à nos pas, et prendre le temps de se faire plaisir.

2. Le mardi, 15 juillet 2008, 09:40 par Marloute

Voilà!